Romain, Donald, Pierre et les autres
Entretien avec Romain Guerret, l’iconoclaste auteur / compositeur / interprète dont les goûts musicaux oscillent, avec la même passion, de The Cure à François De Roubaix, de la variété Française à l’Italo Disco. On s’attarde sur ses débuts, et ses différentes formations : Dondolo, Young Michelin, Aline, ainsi que sur son actualité récente et la prochaine sortie de l’album de son alter égo, Donald Pierre.
Dondolo c’est bien ton premier projet ?
Oui, même si avant Dondolo j’ai fait partie d’un groupe de rock, quand j’avais 15/16 ans. On s’appelait Foggy Notion en hommage au Velvet Underground, que l’on adorait. Ca s’est résumé à 3/4 concerts, mais c’est vraiment mon tout premier groupe. J’ai sorti également un titre autoproduit avec le guitariste de Foggy Notion sous le nom de Hub Hub. On l’avait enregistré chez un copain dans la campagne de Roanne, qui avait un peu de matos. Et à partir de 2000, j’ai commencé à écrire tout seul les titres, qui allaient composer le premier album de Dondolo, Dondolisme.
Comment t’es-tu construit musicalement ?
Je viens de Roanne où il n’y avait pas grand chose au niveau musical et mes parents n’étaient pas de grands mélomanes, mais j’ai été tout de suite attiré par la musique. J’étais passionné par la presse musicale comme Best et Rock & Folk. Je me suis fait ma culture musicale un peu tout seul, grâce à ces magazines. A partir de la seconde, je voulais monter un groupe, et puis la découverte du punk anglais, des Pixies, et du Velvet Underground m’a complètement chamboulé. C’est à ce moment, que j’ai monté Foggy Notion. On s’est assez vite séparés car, comme souvent dans les groupes d’étudiants, tout le monde n’a pas le même niveau de motivation. Et puis les samplers sont arrivés, les homestudio se sont démocratisés, et tout cela m’a permis de me rendre compte que je pouvais faire de la musique tout seul sans avoir un groupe qu’il faut traîner en répétition. Je me suis donc équipé d’un ordinateur et de quelques synthés. Ce qui me plaît aussi pas mal dans la musique, c’est la production. Parallèlement à ça je découvre la musique électronique, gamin j’adorais l’Italo Disco, genre qui était un peu décrié à l’époque, considéré comme de la soupe, car c’était un des styles mainstream qui passait beaucoup à la radio, mais finalement ça a plutôt bien vieilli. A 14 ans, je découvre la musique de Manchester, du coup je ne voulais plus entendre parler d’Italo Disco, et au début des années 2000 j’ai recherché cette synthèse entre l’indie pop et les hits de l’Italo disco.
En dehors de l’Italo Disco on perçoit dans Dondolo un lien avec la variété française des années 70/80 (Chanteur à succès) et les musiques de films de Vladimir Cosma ou François de Roubaix, est-ce le cas ?
Effectivement, j’ai oublié de parler de la variété française de ces années-là, que j’aime beaucoup, notamment des artistes comme Delpech, Polnareff ou Christophe. François de Roubaix c’est une de mes grandes idoles, j’ai toujours beaucoup aimé les musiques françaises instrumentales, ces sons que l’on entendait en fond des films que nos parents regardaient.
Sur Dondolisme, le premier disque de Dondolo , tu es auteur, compositeur, interprète, on peut parler d’un album solo ?
Oui c’est un album solo. Dondolo c’est très naïf, je ne suis pas un grand instrumentiste, je m’amusais avec un ordinateur, une boîte à rythmes et quelques synthés de façon un peu enfantine, en essayant de recopier des sons, sans y arriver, et finalement j’ai sorti quelque chose de différent. A l’époque, j’étais à contre-courant, je faisais de la synth pop, mouvance “jeunes gens modernes”, alors qu’on était en plein dans la house et la french touch.
Beaucoup de textes semblent autobiographiques (J’ai deux amours, Zarte melody) et sur certains titres tu te mets dans la peau d’un personnage (La ligne du temps, Chanteur à succès) : dans quel type d’écriture te sens-tu le plus à l’aise ?
J’ai beaucoup de mal à écrire, je n’ai pas beaucoup d’imagination. Effectivement les textes parlent souvent de moi, quelquefois d’une manière détournée, mais c’est au 3/4 autobiographique. Et puis la musique, par le prisme de l’écriture, me permet aussi de dire des choses que je n’arriverais pas à exprimer directement aux gens.
N’y a t-il pas sur ce premier album un côté “pied de nez” à ceux qui s’estiment être les gardiens du bon goût ?
Oui c’est vrai que dans Dondolo il y a un peu de ça, et puis je voulais quitter mon pré carré indie pop où il y a des gens un peu pénibles dans ce milieu-là. Je suis assez iconoclaste et j’adore casser ce que j’ai aimé également, descendre les choses de leur piédestal parce qu’après tout ça ne reste que de la musique. Il peut y avoir des chansons d’Ottawan qui soient formidables, aussi formidables que certaines chansons de Cure ou des Smiths. Je mets un peu tout sur le même pied d’égalité, et avec Dondolo il y avait vraiment cette envie de foutre un peu le bordel là-dedans et de dire voilà mes références, elles proviennent de plein de styles différents.
Paradoxalement, derrière le côté “foutraque” de la musique, on devine un spleen qui traverse le disque, accentué par des textes évoquant la nostalgie, la fuite du temps, les perdants magnifiques. Est-ce que cette dualité, entre le côté dansant de la musique et la mélancolie des textes, n’est pas finalement le fil conducteur de tous tes projets ?
Oui je le pense, et ça sera toujours comme ça. Je ne suis pas monolithique, personne ne l’est, il y a effectivement une dualité en filigrane. A 8 ans, j’étais un gamin qui était déjà nostalgique et un peu spectateur des choses. J’ai un côté très mélancolique, et également une autre facette qui aime bien déconner, se marrer, faire le con, peut être pour exorciser l’aspect morose de ma personnalité. Ces deux choses s’entrechoquent et se répondent tout le temps, c’est mon ADN, je suis comme ça dans la vie, je peux avoir des moments où tout me rend triste, une image, une musique, et une heure après raconter des conneries à la terrasse d’un café. J’aime bien que les choses changent, j’aime aussi la nuance, être sur plusieurs plans comme danser sur une musique triste et des paroles drôles ou l’inverse.
Sur le deuxième album de Dondolo, c’est toi qui écrit encore tous les titres mais cette fois-ci tu t’ entoures d’un groupe qui te suivra sur Young Michelin et Aline : comment s’est construite cette formation ?
Avec Dondolisme, je n’avais pas pu vraiment faire de concerts, ça ne s’y prêtait pas. En 2007 j’en ai eu marre des synthés et des boîtes à rythmes, j’avais envie de revenir à quelque chose de plus rock, et je me suis dit que je devais prendre des musiciens et jouer les titres de Dondolisme en concert, ce qui s’est avéré être une connerie, car ce n’était vraiment pas bien. Mais cela m’a permis de rencontrer des musiciens, qui allaient devenir les musiciens d’Aline par la suite. Arnaud, je le connaissais depuis une dizaine d’années parce qu’il était sur Aix, Laurent Maudou est mon cousin, et les autres je les avais recrutés en organisant une sorte d’audition. Le disque est bien mais je trouve qu’il est très mal produit, notamment les batteries. J’aimerais bien récupérer les bandes pour refaire le mix, car je trouve qu’il y a de très bons morceaux. J’avais envie de retrouver une écriture plus classique, le deuxième album de Dondolo est le lien entre Dondolo et Aline.
Même si on retrouve encore quelques synthés typés 80, il y a clairement un virage qui est négocié : les guitares sont beaucoup plus présentes, et on se rapproche d’une écriture classique de rock indie (Fauvisme ,Birdlandstorm, 406). L’album est chanté en grande partie en anglais : pourquoi ce choix, pour mieux coller justement à ce changement de style ?
C’est parce que j’avais pas du tout confiance dans l’idée de chanter en français, et puis c’était l’époque où je réécoutais beaucoup de musiques de pop/rock anglaise. Avec le recul, c’était une erreur, je n’aurais pas dû le faire, parce que je ne sais pas vraiment chanter en anglais, je n’ai pas l’accent qu’il faut, et j’aime pas trop les français qui chantent en anglais. C’est aussi par facilité, car j’avais plutôt envie de faire de la musique, du rock, et ne pas trop m’embêter avec les textes, donc c’est plus simple de faire des textes en anglais un peu “cons-cons”.
En 2009, débute Young Michelin : pourquoi ne pas avoir fait un troisième album avec Dondolo ?
A cette époque, je traverse un peu la crise de la trentaine, Dondolo ne rencontre pas de succès et je me sépare de ma femme. Je ne savais plus si je voulais continuer la musique, et finalement je me suis réfugié dans la composition de 3 morceaux en me mettant comme contrainte de n’utiliser qu’une boîte à rythmes, une basse et une guitare. Et là, j’ai un peu lâché ce que j’avais sur le cœur, et mis le tout en ligne sur myspace.
Avec Young Michelin, vous sortez un EP et vous remportez le concours « CQFD : Ceux qu’il faut découvrir » organisé par Les Inrockuptibles avec le titre Les copains. En qualité de vainqueurs, vous gagnez une semaine d’enregistrement à New york dans le studio d’Andy Chase : que retiens-tu de cette expérience ?
Je m’étais vraiment inscrit à l’arrache à ce concours, on le gagne et ensuite Les Inrocks avaient organisé un concert à la Cigale, et là ça c’est très mal passé. Nous n’étions tout simplement pas prêts, et nous avons décidé d’avoir une attitude très froide, très statique, pas un mot pour le public, c’était un parti pris, mais cela n’est pas passé. En plus, on a foutu le bordel à la soirée d’après concert. On s’était mis tout le monde à dos et on a failli ne jamais partir. Finalement, on part quand même en Amérique, où je n’étais jamais allé, et on arrive en plein hiver à New York, pour bosser dans un super studio d’enregistrement, tu crois juste rêver. Après, on n’avait pas énormément de morceaux et le groupe n’était pas trop rôdé. Finalement, on a enregistré sept morceaux mais il n’y en a que deux sur l’album, parce que les autres manquaient de maturité.
Dans un reportage où on vous suit pendant cette semaine, on vous voit discuter de la rythmique avec l’ingé son en écoutant Fire in Cairo de The Cure. Ce groupe a-t-il été une source d’inspiration importante pour toi ?
L’idée directrice de Young Michelin étaient les tout premiers Cure et François de Roubaix. J’ai découvert Cure quand j’étais gamin, j’avais un cousin qui m’avait fait une cassette de la compilation Standing On The Beach. Ce que j’apprécie chez eux c’est surtout leur première période, ce côté très simple, arides, très post punk de Three Imaginary Boys et Seventeen Seconds.
L’aventure Young Michelin devient Aline : pourquoi avoir changé de nom ?
On a trouvé une éditrice qui voulait produire l’album, mais elle souhaitait à juste titre que l’on change de nom pour éviter qu’il y ait le moindre problème avec Michelin. On a quand même fait une demande à l’entreprise pour garder le nom, mais elle a été refusée. Le nom Aline vient de la bio que j’avais écrite sur myspace pour Young Michelin. J’avais voulu faire comme un jeu de piste pour trouver nos références, et le nom de la ville où s’étaient rencontrés les pseudos musiciens du groupe était donc en rapport avec Christophe.
En 2013, sort le premier album d’Aline : Regarde le ciel. Très bien reçu par la critique, il est élu album de l’année par le magazine Magic. Dans les papiers de l’époque on vous compare souvent aux Smiths. Vous n’en n’aviez pas marre d’être associés aux Mancuniens ?
C’est pour tout le monde pareil, dès que tu fais de la musique, tu es toujours comparé à d’autres groupes. Ça nous faisait plutôt plaisir d’être comparé aux Smiths, mais beaucoup moins quand c’était à Indochine … Dans la presse rock, on te parlait de Cure, de Sarah Records, et quand on avait des articles dans Télé7jours ou Marie Claire on se retrouvait associés à Partenaire Particulier ou même Gold ! Mais ce qui me gavait encore plus c’était que tous les papiers étaient axés sur le fait qu’on chante en français, comme si Daho ou Taxi Girl, qui chantent en français sur une musique pop/rock anglaise, n’avaient jamais existé.
L’album a été réalisé par Jean-Louis Piérot : était-ce votre choix initial ?
Non ce n’était pas le choix initial. En fait, la productrice/éditrice Anne Claverie, Jérôme Pierdet, et Jean-Louis ont monté un label pour sortir le premier album d’Aline, car aucune maison de disques ne voulait nous signer. Jean louis étant producteur, il avait son studio, donc ça s’est fait naturellement, en plus c’était l’homme de la situation car il connaissait très bien le son que l’on souhaitait avoir.
Les textes sont compréhensibles, très autobiographiques et comportent peu de métaphores. On s’identifie facilement à des titres comme Je bois et puis je danse, Deux hirondelles, ou encore Elle m’oubliera : était-ce une volonté délibérée ?
Pour moi, un texte qui marche, c’est un texte qui quand tu l’écoutes tu te dis “ là il raconte mon histoire” quand ça fonctionne comme ça c’est super, parce que les gens s’approprient la chanson. L’idée c’était effectivement d’être le plus simple et direct possible.
En écoutant le disque, un parallèle me semble évident avec l’album Voilà les anges du groupe Gamine : est-ce que tu connais ce groupe ?
Oui j’aime beaucoup Gamine mais pour le coup il fait partie des groupes que j’ai redécouvert à l’époque du premier album d’Aline, parce que des gens m’en parlaient, et d’autres que j’ai découvert comme Les fils de joie. Gamine je les connaissais parce que j’avais écouté Le Voyage et Voilà Les Anges, mais lorsque j’ai créé la charte musicale de Young Michelin et d’Aline je n’avais pas du tout Gamine en tête, mais plutôt Cure , François De Roubaix et The Wake. Finalement, Aline m’a permis de découvrir ou redécouvrir des groupes français des années 80.
Est-ce vrai que les titres ont été composés dans une tonalité, qui ne correspondait pas à celle de ta voix ?
Sur cet album oui c’est vrai. J’ai compris bien plus tard que quand tu écris une chanson il faut trouver la bonne tonalité de voix. Je suis musicien mais je n’ai pas étudié la musique, je suis autodidacte, donc tout ce que je fais est très instinctif. Quand je composais pour cet album, je trouvais trois suites d’accords sur la guitare et je chantais dessus, sans penser à monter ou descendre la gamme pour être plus à l’aise, donc sur pratiquement tous les morceaux de l’album je ne chante pas dans la bonne tonalité. Ça se joue à des demi-tons mais suffisamment pour ne pas être à l’aise en concert.
Ce disque n’est-il pas un aboutissement de ce que tu souhaitais faire en terme d’indie pop ?
J’avais vraiment envie de synthétiser un style, quitte même à utiliser certains clichés, mais je souhaitais pousser à fond cette esthétique. Le but ultime était d’arriver à une synthèse de toutes mes références tout en étant quand même un peu original aussi, pour ne pas juste faire du copier/coller.
Les styles musicaux sont beaucoup plus variés sur le deuxième album, La Vie Électrique. Est-ce que l’objectif principal était d’éviter une redite ?
Oui clairement, on avait l’envie de faire un truc différent. On avait notre son et notre patte et on s’est dit qu’on pouvait aller explorer des styles un peu différents, ouvrir un peu les horizons musicaux, à partir du moment où ça sonnait toujours Aline. On souhaitait également revenir sur nos influences passées, comme le funk, qui avait été mis un peu de côté sur le premier album. L’écriture a été un peu plus collective, cela a permis aussi d’amener cette variété de style.
Sur le dernier titre de l’album, Promis, juré , craché, tu annonces vouloir arrêter le rock. Est-ce qu’on peut encore jouer dans un groupe de rock à 46 ans ?
Quand le projet Aline a débuté je commençais déjà à me sentir un peu vieux. Je suis arrivé sur le tard, j’ai fait absolument ce que je voulais, il y a ces deux albums, que dire de plus ? Dans la mythologie de la pop, les groupes de rock, de punk, ils sont jeunes, et moi je me demandais si c’était pertinent de faire ce genre de musique en 2015 à mon âge. C’était un questionnement personnel que j’ai eu effectivement. Après je n’ai pas trouvé de réponse à ça parce que j’aime toujours autant cette musique. Il y a ce truc typiquement français qui veut que lorsque tu es un peu mature tu dois arrêter de faire de la musique, et je trouve ça complètement con, tu peux très bien faire du punk jusqu’à 70 balais si ça te fait plaisir. Et puis tout est décalé, 46 ans en 2020 c’est pas comme 46 ans en 78. Comme je te le disais, je m’ennuie vite et j’aime changer, dans mes influences, faire des va-et-vient, et pour le deuxième Aline je suis arrivé un peu au bout de ce que j’avais à dire et à faire, et ça m’a fait marrer de placer ce morceau en dernier, c’est un peu un pied de nez aussi.
Peux-tu nous donner des nouvelles d’Aline, peut-on s’attendre à une prochaine sortie ?
Pour être franc, on est complètement en stand-by depuis 2016. On avait envie de faire un troisième album, mais il y a eu des changements de staff chez PIAS, notre directeur artistique et toute la super équipe qui s’occupait de nous s’est faite virer. C’était également le moment où les maisons de disques ont commencé à vouloir plutôt signer des groupes de rap, PIAS a monté Urban, sa division musique urbaine. La french pop commençait à ne plus avoir le vent en poupe, et il ne faut pas se leurrer, on avait une super couverture médiatique, mais on ne vendait pas des masses. La conjoncture n’était vraiment pas favorable pour se lancer dans un nouvel album, et divers problèmes personnels ne nous ont pas aidé à retrouver de la motivation. Mais on continue à avoir des activités séparément, Vincent notre batteur joue avec d’autres groupes sur Paris. De mon côté, j’ai fait l’album d’Alex Rossi avec Arnaud, et puis j’ai aussi lancé le projet Donald Pierre.
Alors justement Donald Pierre c’est quoi exactement : un nouveau projet solo à la Dondolo ?
Au départ, ce n’est pas un projet solo mais des maquettes que j’avais faites pour un hypothétique troisième album d’Aline. Mais on ne s’est pas mis d’accord avec le reste du groupe, ça ne plaisait pas à tout le monde. Donc j’ai gardé les titres, j’en ai fait d’autres, et de fil en aiguille, pendant 6 ans, j’ai fait pas mal de titres pour m’amuser, et je me suis retrouvé un alter égo. C’est effectivement un peu un retour à Dondolo, un autre cycle au cours duquel je refais les choses tout seul. J’y trouve un certain plaisir, je n’ai aucune pression, et je n’espère plus faire de l’argent avec la musique de toute façon. Je n’ai pas cherché de label, et cet été un couple de Nantes me contacte, et me dit qu’ils veulent avoir un album vinyle de Donald Pierre et qu’ils souhaitent le financer. Ils m’ont donc donné une enveloppe en me précisant que j’étais libre de faire ce que je voulais à la seule condition de mettre le titre Ma panthère dans la tracklist, car ils adorent cette chanson. Ça m’a redonné un peu la niaque de voir qu’il y avait des gens qui aiment ce que je fais. Donc, c’est en train de se faire, à mon rythme, c’est moi qui vais m’occuper de tout, et je pense pouvoir sortir le vinyle courant février. Je compte aussi le mettre sur les plateformes numériques, bandcamp, et pour la distribution je le ferai de la main à la main chez mes potes, qui tiennent des magasins de disques.
En t’écoutant, on ressent cette envie de passer à un projet moins contraignant, tu en avais marre des compromis ?
J’avais envie de retrouver un peu la liberté d’agir seul, y compris en assumant mes erreurs, faire tout ce que je veux du début à la fin. Je n’ai pas à demander : “est-ce que cette ligne de basse te plaît ?”. Je fais ce que j’ai envie, et ça fait du bien de retrouver cette liberté.
Chanteur À Succès, Promis, Juré, Craché, Quadra Vénér, on retrouve souvent cette peur de vieillir dans tes textes : est-ce que tu redoutes le passage dans l’autre moitié de siècle ?
Oui je la redoute depuis que j’ai 40 ans. Tu sais que tu as passé la moitié de ta vie, c’est toujours un peu flippant de se dire : “je vais où, je fais quoi ?”. Comment passer ce cap-là, être toujours aussi passionné par ce que je fais, ne pas être désabusé. J’ai peur de la mort, j’ai peur du temps qui s’en va, c’est quand même dingue quand j’avais 12 ans je pensais déjà comme ça. C’est comme les Buzzcocks qui chantaient qu’ils voulaient avoir 16 ans alors qu’ils en avaient 18.
En visionnant tes vidéos sur Youtube, je suis tombé sur une parodie de documentaire qui suit la vie d’un artiste pathétique : “12H avec Donald Pierre (24h c’était trop long)”. C’est quoi exactement : une blague entre potes (Alex Rossi et Arnaud Pilard y participent également) ?
En fait, c’est une parodie d’un truc qui existe vraiment, ça s’appelle “24h avec Claire Laffut”. C’est une chanteuse belge, mannequin, influenceuse, ce genre de créature moderne ridicule. Un média numérique faisait des petites pastilles sur des artistes, et un jour on voit ce truc-là et je me dis mais il faut en faire une parodie. En 3 jours, on a repris le docu plans par plans, et on s’est vraiment bien marré en le faisant.
Le fait de ne jamais se prendre au sérieux semble important pour toi ?
C’est ma nature, je n’y arrive pas. Ce n’est pas forcément bien parce que si tu veux que les gens te prennent au sérieux, il faut soi-même se prendre au sérieux, ça je l’ai compris, mais je n’y arrive pas. Je prends beaucoup de recul sur les choses. Et puis les gens qui se prennent au sérieux m’agacent très vite, j’ai très vite envie de juste leur dire d’arrêter.
Merci à Romain Guerret pour sa disponibilité.
Pour compléter cet article, une playlist de titres de Dondolo, Aline et Donald Pierre est en écoute ici
Pour acheter l’album Disco Polemica c’est ici : https://donaldpierre.bandcamp.com/