Entretiens

Laurent Garnier : Habemus DJ

Profitant de sa présence au festival Yeah ! où il officie en tant que co-organisateur, nous avons eu l’immense plaisir de pouvoir nous entretenir avec le « pape » de la techno, Laurent Garnier. L’homme engagé, dont l’intégrité est restée intacte, revient sur une carrière de plus de 30 ans : ses multiples collaborations, ses réussites, mais également ses moments de doutes, le rendent profondément humain, éloigné de toute forme de starification.

Early works

Ton père était forain, est-ce que cela a eu une incidence sur le fait que tu sois devenu DJ ?

Je pense qu’il y a forcément un lien parce que ce qui me plaisait le plus dans le monde des fêtes foraines, hormis les sensations que pouvait me procurer un manège, c’était la musique et les lumières. Les forains avaient des sonos énormes, et souvent la musique était bonne car ils avaient des deals avec les disquaires branchés de l’époque. Mais hormis ça, j’ai toujours eu une fascination pour la musique qui est faite pour danser, et j’ai toujours voulu être la personne qui faisait danser les autres. Quand j’étais tout petit je passais ma journée à enregistrer des sons, des voix, sur un petit magnéto à cassette, c’était un truc viscéral. Je n’avais aucune envie de jouer au foot ou au basket avec mes potes, tout ce que je voulais c’était parler de musique et en écouter. Plus tard, avec mon voisin, nous avons créé une émission sur une radio pirate. J’ai gardé toutes les cassettes de ce que je faisais à cette époque-là. Il faut bien comprendre que c’est vital pour moi, c’est ma vie, je pense être né pour ça, et j’ai eu la chance de trouver ma vocation très rapidement.

Quels chemins as-tu emprunté avant d’écouter de la techno ?

Depuis que je suis gamin j’ai toujours écouté toutes sortes de musiques. J’avais des potes qui écoutaient du reggae, d’autres de la soul, du rock, ou de la new wave. Je me sentais bien dans tous ces styles différents mais j’ai toujours été exigeant sur la qualité de ce j’écoutais. Et pour moi la house et la techno ce n’est qu’une synthèse de toute cette musique-là. A Detroit dans les années 80 le DJ Electrifying Modja avait une émission de radio durant laquelle il passait de la musique autour de différents thèmes. Il pouvait enchaîner New Order,  Funkadelic, puis Kraftwerk. Les mômes de Detroit ne comprenaient pas d’où venait cette musique, comment elle était produite, ils ont essayé de copier ces textures, et c’est comme ça qu’est née la techno.

laurent garnier hacienda
L’Hacienda

Tu ne regrettes pas d’être arrivé trop tôt à l’Hacienda et de ne pas avoir vécu l’explosion du summer of love en étant DJ dans ce club ?

J’ai vécu le début du summer of love, j’ai goûté au truc, et c’était vraiment horrible de me barrer pour aller à l’armée, mais quand je suis revenu un an après l’Hacienda avait tellement changée … Je pense que sa réputation dans le monde est beaucoup plus grande que ce que cela a vraiment été. C’est effectivement un club mythique, et c’était de la folie à un moment donné, mais sur une période très courte. Rapidement, l’Hacienda a été gangrenée par les gangs, jusqu’au point où en 90/91 c’était eux qui tenaient la porte et qui faisaient rentrer leurs dealers.. C’est devenu un endroit pas cool du tout et extrêmement violent. Les gangs ont tué la scène de Manchester. Je suis retourné jouer à l’hacienda en 89/90 et j’ai détesté ça. J’ai mis très longtemps avant de retourner à Manchester … Finalement j’ai eu la chance de vivre l’Hacienda dans son côté naïf.

laurent garnier légion d'honneur

Tu t’es souvent battu contre les institutions pour que la techno soit reconnue. Lorsque l’on t’a proposé d’être décoré de la légion d’honneur en 2017, as-tu hésité avant d’accepter ?

Je n’ai pas hésité très longtemps. Déjà c’est un gouvernement de gauche qui m’a donné cette distinction, et si il y a bien un gouvernement qui a fait bouger les choses pour la techno c’est bien eux, et notamment Jack Lang. Sans lui, on n’aurait pas eu la techno parade, il a été notre meilleur ambassadeur culturel, et le meilleur ministre de la culture que l’on ait jamais eu. Je n’ai jamais fait de concession, j’ai toujours suivi mon chemin. Quand j’avais 10/12 ans je rêvais d’être DJ, et je l’ai fait avec énormément de sincérité, de passion. Si 25 ans après, on commence à reconnaître un tout petit peu ce que j’ai fait et bien je ne vois pas pourquoi je dirais non. Pour autant je n’ai pas changé mon fusil d’épaule et je continue à me battre, à ouvrir ma gueule, et quelque part avec cette légion d’honneur, ça me permet d’avoir encore plus d’impact. Pour moi ce n’est pas plus néfaste que quand je suis allé chercher ma victoire de la musique, c’était 6 mois avant la techno parade, et le jour où je suis arrivé pour faire les répétitions, on m’a dit “Qu’est ce que vous venez foutre ici avec votre musique de merde”.

Quand tu vas mixer au Bassiani en Georgie, club connu pour sa défense de la liberté d’expression, tu es dans une certaine forme d’engagement ?

Quand je vais mixer en Israël dans un club qui est tenu par un juif et un arabe qui sont en couple, ce n’est pas anodin. Je me suis fait défoncer sur les réseaux sociaux pour ça, jusqu’à un point où je me suis demandé si je devais y aller ou annuler. Quand je vais mixer pour la réouverture du Bataclan après les attentats, ce n’est pas anodin. Maintenant tu ne peux pas faire que des trucs engagés car ça peut devenir fatiguant, mais ne pas être engagé du tout est une vraie erreur. Pour moi c’est naturel, mon boulot c’est d’aller rencontrer les autres, et de raconter des belles histoires, et une fois de temps en temps tu te dois de t’engager. Mais tu peux aussi y laisser des plumes , comme lorsque j’ai reçu des lettres de menaces après avoir joué Porcherie des Béruriers noirs. Je me suis alors rendu compte que les choses avaient changé et, ce qui est terrible, qu’il fallait faire un peu plus attention, mais je n’ai aucun problème à le rejouer dans un set parce que j’assume.

Wake Up !

laurent garnier nuits sonores 2021
Nuits Sonores 2021 (crédits Brice Robert)

Tu as repris les set au début de l’été dernier, quelle a été ta sensation lorsque tu as posé la cellule sur le premier vinyl ?

C’était aux Nuits sonores, j’ai commencé à avoir les larmes aux yeux et j’ai terminé mon set en pleurs. C’était très émouvant, je ne savais pas si j’allais y arriver … Je suis quelqu’un qui se pose beaucoup de questions, tout le temps … Je suis un traqueur fou et avec le temps ça s’amplifie. La chose la plus importante pour moi c’est de dormir avant le set parce que ça me calme et la fatigue est ma pire ennemie.

Quand tu joues devant un public très jeune, tu ne te sens pas quelquefois en décalage ?

Le COVID a fait que j’ai énormément réfléchi sur la suite à donner à mon activité de DJ, et j’ai pris la décision que j’allais arrêter la nuit telle que je l’ai faite pendant 35 ans d’ici 2 ans. Je n’avais pas envie que ça soit le COVID qui m’arrête. J’adore jouer, j’aime toujours autant ça, mais je n’ai pas envie de devenir un vieux jukebox poussiéreux. Quand je vois mon fils prendre les platines, je me dis que c’est plus à lui de le faire. Après c’est ma vision, Francois Kevorkian a plus de 60 balais, on va fêter les 60 ans de Carl Cox et il est toujours excitant à voir. Mais j’ai toujours dit à mon agent : “un jour la roue va tourner et il faudra que je m’arrête avant de ne plus être légitime”. Après, je ferai peut-être 2 ou 3 dates par an mais c’est tout.

Hang the DJ

Pourquoi les DJ ont ils parfois été perçus comme des imposteurs ?

En Angleterre, ça ne leur a jamais posé de problème, parce qu’ils ont toujours été avides de nouvelles musiques et tendances. La scène rave a popularisé les groupes rock de l’époque comme les Happy Mondays, James, ou Inspiral Carpets. Ce sont des enfants de la rave, et ils ont très vite compris que les gamins qui écoutaient du rock étaient aussi ceux qui écoutaient de l’acid house. C’est en France que l’on a été vus comme des imposteurs. La France était un pays de rock, et qu’on est arrivé avec cette musique-là, la première chose qu’on a dite c’est “Rock and roll is dead !” parce que le monde du rock nous a accueilli comme si nous étions des parias. Pour eux, la techno était de la musique de drogués, de pédés, qui n’était pas jouée avec des “vrais” instruments … et surtout c’était la première fois en 30 ans qu’il se sont vus bousculés ! Et puis de nouveaux groupes sont arrivés, ils utilisaient des boîtes à rythme, des synthés, et tout ça s’est calmé, mais ça a mis du temps. Le pays qui a très vite compris ça, c’est la Belgique. Les mecs ont ralenti le tempo de la house, ajouté des trucs assez froids qui venaient de leur influence EBM et c’est comme ça qu’est née la New beat.

Certains DJ aiment se confronter au public, c’est ton cas ?

Tu peux effectivement être dans la confrontation, mais tu ne peux jamais complètement imposer quelque chose. C’est comme dans une relation amoureuse, il faut y aller par étape. Cet été j’étais dans un festival à Marseille et j’avais envie de jouer de la trap et de la drill, avec en face de moi un public qui venait pour écouter de la techno. J’ai mis 2h30 à y arriver, jusqu’au moment où j’ai senti que j’allais les perdre, et j’ai bifurqué sur autre chose, mais si ça avait marché j’aurais été plus loin. Je pense que c’est toujours bien de surprendre le public, de le sortir de sa zone de confort, de lui faire écouter quelque chose qu’il n’était pas prêt à écouter. Maintenant on n’est pas des profs, on n’est pas là pour imposer, mais pour construire avec les gens, ce n’est pas un concert. Tout dépend aussi de l’endroit dans lequel tu joues. Et puis les gens payent pour venir te voir et tu ne peux pas dire : “Je fais ce que je veux”, mais pour autant je ne vais pas jouer un track hyper putassier parce que je sais que ça va mettre tout le monde d’accord.

On a quelquefois écrit que tu étais meilleur DJ que compositeur. Est-ce qu’une carrière uniquement de DJ aurait pu te combler ?

Je ne sais pas … J’adore de plus en plus composer parce que je pense avoir trouvé une façon de travailler qui me convient. J’ai toujours souffert du fait de ne pas être musicien, quelqu’un qui arrive à te tirer les larmes avec son seul instrument, mais je ne suis plus  complexé par rapport à mes compositions. Je l’ai été longtemps et c’est pour ça que j’ai travaillé avec des musiciens de jazz. Mais c’est vrai qu’au point de vue du plaisir direct, je préfère jouer parce que c’est instantané. Si tu arrives à enchaîner le bon disque au bon moment, la salle va exploser, il va y avoir une énergie incroyable, et ça c’est comme une drogue. La composition, c’est différent car tu ne t’arrêtes que quand quelqu’un vient te dire : “Le titre sort dans 15 jours, je vais avoir besoin des masters”. Je ne fais pas beaucoup de musique mais je vais toujours au bout, je ne jette rien, je change tant que je ne suis pas satisfait du résultat. J’ai sorti absolument tous les morceaux sur lesquels j’ai travaillé. C’est Laurent Colas (alias Elegia N.D.L.R.), avec qui j’avais travaillé sur Unreasonnable Behivior, qui m’avait dit au début de notre collaboration : “Laurent il y a une règle à respecter, tu ne jettes jamais rien, parce que tout se transforme”. Mes morceaux changent beaucoup dans le temps, je suis un éternel insatisfait, j’ai du mal à lâcher.

Tu ne t’es jamais dit, ce morceau-là il est parfait ?
Non, mais pour moi le plus beau morceau que j’ai fait c’est Acid Eiffel, avec Shazz et Saint Germain. Sur les derniers titres que je vais sortir, il y a le morceau Tales from the Real World qui m’émeut profondément, je l’aime beaucoup, mais c’est très personnel comme ressenti.

D’après toi, à quoi est dû ta longévité ?

Je pense que c’est le fait d’être resté droit dans mes bottes et d’être resté sincère. Je n’ai jamais fait le truc pour moi tout seul. J’ai toujours aidé plein de gens, été à l’écoute, et je pense que les gens l’ont bien compris. Quand je rencontre quelqu’un qui me dit : “c’est un bonheur de travailler avec ton agent” c’est parce que je veux que les choses se passent ainsi, simplement et normalement. Quand je bosse sur un plateau, je dis toujours bonjour, au revoir et merci parce qu’il y a des gens qui bossent pour toi et tu ne dois pas les traiter comme de la merde.

Honey I’m home !

Je te cite dans ta bio Electrochoc : “La France doit être l’un des seuls endroits dans le monde où la réussite est considérée comme suspecte. Partout ailleurs les artistes locaux sont d’abord soutenus par leur pays.” C’est encore le cas ?

Alors les choses changent mais pendant longtemps il y a eu ce truc de dire c’est français donc c’est pas bien. Acid Eiffel en est un bon exemple, quand on le sort sur Fnac Dance Division, on n’en vend pas 3, puis un jour Derrick May vient jouer au Rex, il entend le titre et veut le signer sur Fragil (sous label de Transmat N.D.L.R.), et là on explose tous les compteurs. Quand il a monté le label Fnac Dance Division, Eric Morand a compris dès le départ qu’il fallait vendre des disques à l’étranger, parce que si ça marche là-bas ça reviendra en France. Les deux premiers disques que l’on a vendus énormément étaient mon titre Wake up et The Meltdown de Lunatic Asylum, et ils ont d’abord cartonné en Allemagne et après en France. Alors il y a le contre-exemple Daft Punk, mais qui avant et après eux sont à leur niveau ? Si on ne parle uniquement en termes de renommée internationale, il n’y a que Guetta. David il a fait très fort car il a réussi à changer fondamentalement les radios urbaines américaines. Il est arrivé à un moment où ces radios ne jouaient que du r’n’b et du rap, et lui en l’espace de 6 mois il a sorti 3 titres qui ont été numéros un et il a changé totalement la programmation de ces radios, c’est un truc de malade. Je suis connu en France mais bizarrement je pense qu’il y a beaucoup de gens qui connaissent mon nom mais pas ma musique, par contre à l’étranger ils connaissent mes titres connus comme Crispy Bacon ou The man with the red face. Si tu regardes ce qui se passe dans d’autres pays, les belges ont toujours fait super attention à leurs productions, tout comme les anglais et les allemands. Maintenant avec les réseaux sociaux les choses ont changé parce que tu as de plus en plus d’artistes intéressants en France, mais pendant des années ça n’intéressait personne.

laurent garnier japon

Le Japon semble être un endroit particulier pour toi, pour quelle raison ?

Quand je mixe au japon je peux me retrouver à jouer un morceau de salsa parce qu’il y a une ouverture d’esprit que l’on ne retrouve pas forcément partout ailleurs. Les Japonais sont jusqu’au boutistes et écoutent beaucoup de styles différents. Qu’ils écoutent du punk, de la soul, ou de la techno, ils connaissent tout, et avant toi ! Il suffit d’aller chez un disquaire pour comprendre, tu trouves absolument tout ce que tu cherches, et dans les clubs, les sound system sont d’une qualité incroyable.

Dans la vidéo du titre Flashback tu te moques des codes des groupes de rock. En 2022, la techno est une musique établie, rattrapée par le marketing et l’industrie du disque, où sont gérées des sommes d’argent considérables. Est-ce que l’ambition initiale de la culture techno, qui était de ne pas tomber dans les travers de la starification, a échoué ?

Non parce que dans toutes les musiques, le rock, la techno, le hip hop ou le jazz, il y a toujours eu un moment où le mouvement est rattrapé par le business qui veut faire du fric avec. Oui il existe une frange commerciale, et si tu veux aller jouer à Las Vegas pour prendre plein de thunes tu peux le faire, mais chacun voit midi à sa porte et défend son truc comme il le veut. J’écoute à peu près 200 disques par jour et je découvre plein d’artistes que personne ne connaît. Il y a toujours une scène underground techno qui est très vivante et très intéressante.

Tu es assez dur avec l’album 30, que tu considères comme inabouti et comportant des erreurs, quelles sont-elles ?

Tous mes albums ont des défauts, mais effectivement je suis plus dur avec ce disque. Mon gros talon d’Achille c’est que je suis un très mauvais ingé son, et je pense sincèrement que si beaucoup de mes morceaux avaient été mieux mixés, les gens auraient peut-être plus compris ce que j’essayais de faire. Je me suis un peu tiré une balle dans le pied à les laisser tel quel.

Dans ta discographie il y a une bascule qui s’opère à partir de Unreasonable Behaviour. Tu t’éloignes du côté dancefloor de la techno, pour t’aventurer vers d’autres territoires comme le jazz, le hiphop, le downtempo, est-ce que ce sont finalement tes œuvres les plus personnelles ?

Bien sûr que oui. Après, tous mes disques ont été personnels, mais tu changes, et quand tu fais de la techno pendant 15 ans, tu as envie d’autres choses. Regarde la carrière de Bowie, le nombre de phases créatives qu’il a eu, c’est ce que j’aime chez un artiste, quand tu sens qu’il évolue, même si tu ne vas toujours tout aimer, par exemple pour Bowie je suis pas un fan de Let’s dance. Tu ne peux pas demander à des artistes de se répéter inlassablement, ils peuvent avoir des erreurs de parcours, mais ce n’est pas grave. L’album avec les Liminanas et celui que j’ai produit pour Abd al Malik sont personnels aussi, ce sont juste des phases différentes.

On the record

laurent garnier documentaire off the record

Dans le documentaire Off the record, on te voit superviser un travail créatif d’élèves d’un collège. Cette dimension de “passeur” est-elle importante pour toi ?

J’ai toujours dit que s’il doit y avoir un épitaphe, je veux qu’il y ait le mot “passeur” dedans. Je ne m’en rends compte que maintenant mais c’est ce que je suis depuis le début, lorsque je réponds aux mecs qui m’envoient des démos, que je les oriente vers des labels, ou que je joue des disques. Quand je reçois j’ai aussi envie de donner, et avec les mômes c’est génial parce que ce n’est que de la discussion. Ils ne connaissent ni moi ni ma musique, j’adore faire ça et je continue à y participer régulièrement. 

Tout au long du documentaire, on partage tes joies, tes réussites mais on découvre également tes périodes de doutes. C’était important de montrer aussi ces aspects-là ?

C’est mon quotidien, je travaille avec les mêmes personnes depuis des années, j’ai eu le même agent pendant 25 ans ! Ils me connaissent par cœur, notamment mes failles, et ça fait aussi parti de mon quotidien de flipper. J’avais dit à Gabin (Rivoire, réalisateur du documentaire N.D.L.R.) au début de notre collaboration qu’on allait pas raconter de connerie, qu’il fallait que ça soit vrai. Alors oui je peux me déguiser, sortir des blagues complètement débiles, mais je m’en fous, je suis comme ça, je ne mens pas. 

laurent garnier liminanas
Liminanas / Laurent Garnier

Comment s’est passée ta collaboration avec les Liminanas pour l’album De Pelicula ?

Ce qui nous lie c’est la trance, on n’en était bien conscient, et le premier truc qu’on s’est dit c’était qu’on voulait faire un disque de trance. Pour autant, je ne voulais pas qu’il y ait de kick droit, parce que je savais qu’on m’attendait au tournant et qu’on allait me le reprocher. Finalement c’est Lionel qui en avait mis un sur Qué calor et je l’ai viré (rires). Ce projet est tombé à pic parce que pendant la période de confinement j’ai fait un rejet total de la techno et j’ai recommencé à écouter de la musique psychédélique, de la soul, de la funk,  et vu le style garage des Liminanas c’était complètement logique pour moi d’aller là-dedans.

Tu es un des organisateurs du micro festival Yeah ! Que retiens-tu de cette mouture 2022 ?

Je retiens qu’au départ je ne voulais plus y participer … Parce que le confinement a fait que j’ai douté de beaucoup de choses, et j’ai dit à Arthur et Nico (les deux autres organisateurs du festival N.D.L.R.) que je ne me sentais pas d’y aller parce que je ne me sentais plus légitime. Déjà que je doutais de mon propre boulot en tant que DJ, le festival Yeah ! c’était des doutes encore plus grands. Ils m’ont demandé si je pouvais au moins m’occuper des hébergements et des runs, et finalement ça m’a fait un bien fou, parce que j’ai senti que j’avais toujours ma place. Mais cette année j’ai beaucoup moins participé à l’élaboration de la programmation, et je n’avais rien écouté de ce que je connaissais pas avant de découvrir sur scène.

Back to my roots

Peux-tu nous parler de ton actualité et de tes prochains projets ?

Le prochain album qui va sortir l’année prochaine sera le plus dancefloor que j’ai jamais fait. La boucle est bouclée et je reviens à l’esprit de Shot in a dark. Il sera viscéralement techno mais avec une production actuelle. Il n’y a pas encore de date de sortie mais peut-être au printemps de l’année prochaine. Cette année je vais sortir 5 maxis , ils s’appellent tous 33T.E.P.S.V et ce n’est pas un hasard, ils sont tous reliés au prochain album … J’ai également composé la musique du film “Entre la vie et la mort”, qui est sorti en juin.

Flashback

Pour conclure, que penses-tu que dirait le Laurent Garnier de 10 ans, qui rêvait de faire danser les gens, au Laurent Garnier de 2022 ?

Mais j’ai vécu mon rêve ! J’ai été au bout de ce que je voulais faire, enfin pas complètement au bout parce que j’ai un projet que je n’ai pas encore fait … Mais j’ai même été bien au-delà de mes rêves. Mon rêve de gosse c’était de faire danser des gens au Palace, parce que c’était LE club en France, et je l’ai fait en 88, donc depuis c’est que du bonus. Je pense qu’il se dirait “c’est cool ce que t’as fait”. C’est bien de croire à ses rêves, je reviens à cette histoire de légion d’honneur, pour moi elle représente la phrase “ il faut croire en ses rêves » parce que si tu en veux et que tu fais les choses avec élégance, tu peux peut-être y arriver. Le chemin n’est pas facile et je ne compte plus les fois où j’ai voulu jeter l’éponge, mais j’ai toujours continué parce que je suis très bien entouré.

Merci à Laurent Garnier de nous avoir accordé cet entretien.

site officiel : Laurent Garnier

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